L'ARTILLERIE DE TRANCHÉE SERVIE PAR L'INFANTERIE

LES MORTIERS

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Historique: Les offensives de la fin de 1914 et du début de 1915 prouvèrent que l'artillerie de campagne et les mitrailleuses étaient presque sans effet sur les défenseurs qui, prévenus de la vague d'assaut par la fin de la canonnade, l'attendaient le doigt sur la détente. On dût recréer une artillerie à tir courbe, d'une part une puissante artillerie de tranchée autonome, d'autre part une artillerie de tranchée moins puissante et servie par l'infanterie même.

Mortier Stokes: Conçu par l'anglais Wilfred Stokes, ce mortier de tranchée et d'accompagnement était utilisé par l'infanterie. Il est composé d'un canon (23,5 kg), d'une fourche (13 kg) et d'une plaque de base (14 kg). Chaque pièce peut être portée et servie par deux hommes. Une section est constitutée de deux pièces. Certains modèles tiraient la munition britannique de 3 pouces (81mm), d'autre une munition française de 60mm.

La munition française était la Brandt-Maurice en fonte à ailettes chargée de 550g d'explosifs et munie d'une fusée percutante instantanée. Sa forme générale ressemblait à celle du Brandt pneumatique (cf. ci-dessous). Pour tirer il faut laisser tomber le projectile au fond du canon en le présentant par la bouche, la cartouche du culot de l'obus heurte le percuteur fixe qui fait saillie au fond du canon, elle détone et l'obus part aussitôt en l'air. La cartouche contient 12g de poudre et on peut rajouter de 1 à 4 relais de 7g de poudre contenus dans des tubes en celluloïd à griffes.

On agissait sur la portée soit en manœuvrant la vis de pointage en hauteur, soit en donnant différentes positions à la fourche, soit en renforçant la force de projection de la cartouche par l'adjonction de bagues ou relais.

La munition anglaise en acier pesait 5,35kg, était chargée de 1,37kg d'explosifs et avait une fusée à temps qu'il fallait régler suivant la distance.

  • Calibre: 60mm (calibre français)
  • Projectile Brandt-Maurice. Des obus spéciaux à phopshore permettaient d'aveugler l'ennemi. 
  • portée maxi: 2000m
  • portée pratique: 1000m

L'intérêt du mortier Stokes était une cadence de tir exceptionnelle donnant des barrages et encagements infranchissables. Dans la défensive il était suceptible d'apporter un appoint puissant aux barrages exécutés par l'infanterie. Dans l'offensive il appuyait l'infanterie dés le début de l'attaque. Une fois que l'attaque a pris pied ils progressaient pour consolider les positions acquises et anéantir les dernières résistances.


Mortier Jouhandeau-Deslandres modèle 1917: mortier léger rayé (2 rayures) de 46 kg transporté en deux parties. On obtient les différentes portées en faisant varier l'angle de tir et la charge. 
  • projectile: 3kg, sans empennages, guidé par des tenons en cuivre et muni d'une fusée instantanée
  • cadence: 10 à 12 coups/min
  • portée pratique: 1000m
  • champs de tir horizontal: 800 millièmes

Obusier Brandts modèle 1915: Il utilise l'air comprimé, ce qui est intéressant à plus d'un titre, il ne produit ni éclair ni fumée et n'encrasse pas les armes. Il est constitué d'un tube d'1m30 de long d'un calibre de 60mm. Un tube concentrique servait de réservoir d'air comprimé. L'affût avait des secteurs gradués permettant le pointage en hauteur et en direction. Affût et canon étaient chacun munis d'une bretelle permettant de les porter à l'épaule. On chargeait le projectile par la culasse, puis on gonflait le réservoir à l'aide d'une bouteille d'air comprimé ou de quatre pompes à vélos. Lorsque la pression voulue était atteinte le coup pouvait être tiré.
  • Calibre: 60mm
  • Poids: 22kg
  • Poids de l'affût: 16kg
  • Angle de tir: 20, 30, 42 et 60°. L'angle de 42° est largement le plus employé
  • Pression: 2 à 15kgf
  • Cadence de tir: 18 coups/min avec la bouteille

Obusier brandt modèle 1915

Obusier Brandt modèle 1915     Obusier Brandt - Fonctionnement

Projectiles: l'obus en verre permettait de lancer des produits incendiaires, asphyxiants, toxiques, lacymogènes ou explosifs. Une charge d'explosif permettait de simuler un gros obus pour faire croire à l'ennemi que la préparation d'artillerie durait toujours

Obusiers Brandt Projectiles

Obusier Brandt - Autres projectiles

Obusier Brandt allégé modèle 1916 (B.1916): Version allégée du précédent, tirant à angle fixe de 42° sur un bâti en aluminium dont il est solidaire. Le réglage en direction est assuré avec un secteur gradué et un écrou de blocage. Pesant 17 kg cet obusier est facilement transportable sur le terrain. Lors des déplacements on utilise la voiturette du canon de 37. 

Cet obusier est surtout efficace contre le personnel, grâce à son tir courbe que le fusil ne peut pas faire, et surtout utilisé en défensive.

    

Il tirait des projectiles à ailettes de 650g, dont 90g d'explosifs, avec des fusées percutantes fonctionnant par inertie. On faisait varier la portée en ajustant la pression (ci-dessous exprimée en kg):

   

Obusier Brandt Projectiles


Obusier DM (Dormoy-Chateau) modèle 1916: Obusier léger (15kg), tirant les mêmes projectiles que le mortier Brandt, sous angle fixe et pression variable. L'originalité de son mécanisme vient de ce que le clapet obturateur se trouve à la bouche. L'air sous pression entoure le projectile, et lorsque la pression voulue est atteinte, on déverrouille le clapet avec un tire feu. La pression à l'avant du projectile baisse instantanément tandis que la pression à l'arrière le propulse. 

Obusier DM modèle 1916


Bombarde DR: Il s'agit d'un engin de tranchée de secteur, servi par les bombardiers et n'appartenant pas aux unités qui l'emploient. Il se compose d'un bâti métallique sur lequel sont fixés 4 canons de fusils modèle 1874 (cf. Fusil gras) coupés à 40cm environ et fermés hermétiquement. Sur chacun d'eau est brasés deux mandrins pour le lancement de la grenade DR.

Les fusils sont chargés d'une cartouche spéciale de 3,8g de balistite que l'on actionne à distance avec une ficelle. Chaque mandrin est percé de neufs trous le long desquels on déplace un ressort de réglage. Lorsqu'on place la grenade DR sur le mandrin on doit la pousser jusqu'au ressort. La position du ressort correspond à une capacité différente e la chambre d'expansion, donc de la portée.

Le mandrin peut aussi être classiquement adapté au bout d'un fusil et la grenade DR être employée comme la grenade VB (avec une portée plus grande et de plus grands effets destructeurs):

grenade DR avec son mandrin


Source: La science et la vie N°23 octobre-novembre 1915
Manuel du chef de section d'infanterie - Imprimerie Nationale - 1918
Manuel du gradé de cavalerie - Charles Lavauzelle - 1920
Manuel du gradé du génie - Charles Lavauzelle - 1941
Gazette des armes N°114 février 1983