L'ARTILLERIE DE TRANCHÉE
Dans la tranchée, le pis, ce sont les torpilles. Le déchirement produit par ces 50 kg de mélinite en éclatant est effroyable. Quand une d'elle tombe en pleine tranchée, et ces accidents là arrivent, elle tue carrément 15 à 20 types. L'une des notres étant tombée chez les Boches, des pieds de Boches ont été rejetés jusque sur nos deuxièmes lignes - Michel Lanson - 24 juin 1915 - Paroles de Poilus - Librio - 1998
Arbalète sauterelle: elle lance une grenade à 80m
Mortier Cellerier (du nom d'un polytechnicien capitaine d'artillerie): Il est fabriqué avec des pièces de récupération: le corps de l'obus à balles allemand de 77 mm fournit le tube lanceur qui reçoit la charge explosive. Il est percé à sa base pour permettre le passage de la mèche de mise à feu. Le tube est fixé sur un support en bois taillé à 45°. La douille du canon de montagne français de 65 mm rentre très bien dans le tube de 77mm ; chargée de grenaille et d'explosif, elle fournit le projectile. Ce mortier très simple ne comporte aucun dispositif de réglage; pour faire varier la distance de tir, on utilise plus ou moins de poudre pour propulser sa bombe.
Deux coups viennent de partir, deux autres vont l'être - L'illustration 18 septembre 1915
Lance-mines Gatard:Il s'agit d'une adaptation d'un tube de 80 de montagne système de Bange au tir de tranchée. Le tube et l'affût débarassé de ses roues sont fixées sur une plateforme en madriers inclinée à 30°. Les mines (dites "aériennes") de forme cylindrique pesaient entre 60 et 120kg, et étaient composées d'un corps et d'une tige qui était seule introduite dans le canon et sur laquelle s'exerçait la pression. Ce lance-mine est d'une précision remarquable mais n'avait qu'une faible portée (entre 170 et 318m). Il présentait de plus de grosses difficultés d'emploi (trés fort recul non compensé) qui le font abandonner.
Mortier de 58 n°1 (janvier 1915): Il s'agit du premier matériel réglementaire de l'artillerie de tranchée. L'engin de lancement est un tube dans lequel est introduit la charge balistique. La fabrication du projectile est simple et se fait à partir de produits faciles à obtenir et étrangers à la fabrication des obus. De plus l'explosif est constitué de perchlorate d'ammoniaque, un composé inutilisable dans des applications plus classiques, eu égard à sa grande sensibilité aux chocs et au frottements. Cette sensibilité même impose l'utilisation de matériels lisses, tirant à faible vitesse initiale. Toutefois les faibles coefficients d'accélération permettent en retour d'utiliser des projectiles à parois minces et à grande capacité d'explosifs, ainsi que de faciliter la production.
À l'usage ce mortier se révèle assez imparfait. Il est encombrant, difficile à pointer, ne peut être repéré en direction, manque de stabilité, de précision et de puissance. Ce n'était en fait qu'une solution d'attente conçu à la hâte, mais dont aller dériver l'artillerie de tranchée ultèrieure.
Mortier de 58 n°1 bis (mars 1915): il remplace le 58 n°1. Plus bas et plus stable que son prédécesseur, de conception plus classique, relativement mobile, il n'utilise plus le principe (pourtant valable) de canon plein.
Mortier de 58 n°2 (février 1915): Comme le précédent, ce mortier est surtout utilisé pour des effets de surface, comme la destruction des défenses accessoires. Sa bombe plus puissante lui permet de détruire des ouvrages de plus grande importance.
Mortier de 240C modèle 1915:Ce mortier, nettement plus puissant que les précédents, est surtout utilisé pour des effets de pénétration, comme la destruction d'abris. Il est peu mobile et demande du temps pour être correctement installé (plusieurs jours à trois semaines). Il cesse d'être produit en 1916 pour être remplacé par le mortier de 240L modèle 1916.
Mortier de 240L modèle 1916:Comme le 240C qui l'a précédé, ce mortier est conçu pour des effets de pénétration. Il utilise les mêmes projectiles mais la portée est de 1250m. Le tube est allongée et la charge renforcée est contenue dans une douille de 155 CTR Modèle 1904 introduite par la culasse tandis que le projectile est introduit par la bouche.
Mortier de 340T:Ce mortier a été conçu pour obtenir des effets de destruction plus puissants. Aprés une première expérience en décembre 1915 qui permet de mettre le matériel au point, les premières batteries apparaissent sur le front en juillet 1916. Néanmoins son utilisation conduit à des travaux longs et couteux, et son approvisionnement ne peut se faire que par voie ferrée de 0m60. Le rendement obtenu ne correspondant pas aux difficultés d'installation, ce matériel cesse d'être utilisé en avril 1917. Il ne sera construit qu'à une trentaine d'exemplaires.
Mortier de 75 modèle 1915A:Ce matériel est adopté aprés l'offensive en Champagne. Le projectile étant relativement léger, on le stabilise par rotation par l'adoption de rayures, évitant ainsi le poids mort d'un empennage. Il tire jusqu'à 1700m l'obus explosif modèle 1900 du canon de 75, en tir tendu ou en tir vertical. Le projectile se charge par la culasse, et la charge contenue dans un sachet est placée dans une douille de 75 raccourcie. Ce matériel, pas assez mobile eu égard au rendement de l'obus, est abandonné en 1917. Il a néanmoins permis d'utiliser les obus de 75 inaptes au tir du canon car hors tolérances.
Mortier de 150 modèle 1916: On a adopté ce matériel plus puissant quelques temps aprés le modèle de 75. Le projectile se charge par la bouche. Il s'agit toujours d'une torpille à ailettes, mais elle est entièrement à l'intérieur et ne dépasse pas du tube. La charge contenue dans un étui de 75 raccourci se charge par la culasse à volet. Sur roues pour le transport, celles-ci sont enlevées pour la mise en batterie. Matériel hybride, pratiquant le tir courbe, il peut pratiquer le tir tendu à l'occasion. Il compléte l'action des mortiers de 58 mais ne les remplace pas. Ce matériel est remplacé par la suite par un modèle plus perfectionné, le mortier de 150 modèle 1917, ou modèle "de Fabry".
Mortier de 150 modèle 1917 (dit parfois de Fabry):Ce matériel remplace le modèle de 1916. La charge est contenue dans une douille de 65 de Montagne raccourcie et munie d'un tube porte amorce coupé, tandis que le projectile est introduit par la bouche. Il s'agit du seul engin de tranchée à recul compensé par un système de frein récupérateur. Mis en service fin 1918, ils joueront un rôle important grâce à leur mobilité derrière les troupes qui avancent enfin de manière régulière et soutenue.
Mortier Van Deuren: Ce mortier a été conçu par le commandant Van Deuren de l'armée belge. Il remplace le mortier de 58 n°1 bis vers la fin de 1916 et reste en service presque jusqu'aux derniers mois de la campagne. Il tire sous angle fixe de 45°, la variation de la portée étant obtenu par la variation de la chambre de poudre. Le projectile porte une queue creuse qui coiffe le mortier et qui peut glisser le long du tube. La charge balistique est contenue dans une cartouche munie d'un allumeur. La mise à feu se fait par un dispositif électrique.
Ce mortier est stable, précis, mais présente quelques inconvénients: le tube s'échauffe et se dilate au cours du tir et doit être échangé tous les cinq ou six coups, la mise à feu est assez délicate et la puissance trop faible.
Une tranchée TT' reçoit un tir direct, d'écharpe, d'enfilade ou de revers suivant la direction du tir par rapport à son parapet: